La perte de l’autorité parentale induit la perte du droit de visite

  • Article rédigé par la juriste de l’association Espace Droit Famille
  • Autorité parentale et Droit de visite: Cass Civ 1re.1er octobre 2025 n°24-10.369 – la perte de l’autorité parentale induit la perte du droit de visite

En l’espèce, une mère saisit le juge aux affaires familiales pour demander le retrait de l’exercice l’autorité parentale de sa fille, ainsi que la fixation de la résidence habituelle de l’enfant à son domicile sans droit de visite et d’hébergement du père.

Quelques mois après, le père est condamné par le juge pénal et se voit retirer en totalité son autorité parentale, sur le fondement de l’article 378 du code civil, en raison de sa condamnation pour violences volontaires et harcèlement sur la mère de sa fille.

Il décide alors à son tour de saisir le Juge aux affaires familiales pour demander l’octroi d’un droit de visite. Sa demande est rejetée par la Cour d’appel. Sa demande est renouvelée devant la Cour de cassation sur la base de deux arguments.

-Premièrement, il défend que le retrait total de l’autorité parentale n’implique pas automatiquement, de plein droit, la perte de son droit de visite. Autrement dit le droit de visite ne serait pas un attribut se rattachant à l’autorité parentale au sens de l’article 379 du code civil.

-Deuxièmement, il évoque son droit de l’enfant à entretenir des relations personnelles avec ses ascendants tel que prévu par l’article 371-4 du code civil, ainsi que le droit au respect de sa vie familiale (Conv EDH, article 8).

 

Dès lors, concrètement, deux questions étaient soulevées par le pourvoi devant la Cour de cassation. Premièrement, le retrait total de l’autorité parentale prive-t-il automatiquement et nécessairement le parent concerné de tout droit de visite à l’égard de son enfant, au sens de l’article 379 du code civil ? Deuxièmement, les « ascendants », au sens de l’article 371-4 du code civil, englobent-ils les parents, dont celui qui aurait vu son autorité parentale être             retirée ?

D’abord, la Haute juridiction rappelle que l’article 378 du code civil énonce qu’« en cas de condamnation d’un parent comme auteur, coauteur ou complice d’un délit commis sur la personne de l’autre parent, la juridiction pénale peut ordonner le retrait total ou partiel de l’autorité parentale ou le retrait de l’exercice de cette autorité ».Qu’il s’en déduit que « la décision de retrait total de l’autorité parentale entraine pour le parent concerné la perte automatique de son droit de visite, attribut de l’autorité parentale au sens de l’article 379 du code civil (..) »

 

En l’espèce, le père qui a été condamné par le juge pénal pour des faits de violence commis sur la mère de son enfant et s’est vu retiré totalement son autorité parentale perd aussi son droit de visite, en ce que celui-ci est un attribut de l’autorité parentale.

Sur la conventionnalité de l’article 379 du Code civil, la Cour de cassation renvoie à la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme qui n’admet la rupture des relations personnelles entre un parent et son enfant que dans des circonstances exceptionnelles, motivées par l’exigence impérieuse tenant à l’intérêt supérieur de l’enfant[1].

 

Concernant l’article 8 de la CEDH :

Si l’ingérence dans la vie familiale du père est caractérisée par le retrait de son autorité parentale et la suppression de son droit de visite, elle est justifiée car elle poursuit un but légitime : consistant à protéger l’enfant victime ici indirecte des violences intrafamiliale de l’un de ses parents envers son autre parent. L’atteinte à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme est donc écartée.

 

Enfin, sur l’applicabilité de l’article 371-4 du Code civil aux père et mère, la Cour de cassation précise que le terme « ascendants » ne vise pas les parents mais des personnes autres que les parents.  En conséquence, le père ne peut donc invoquer cet article pour obtenir un droit de visite puisque ce droit découle de son statut de parent et de l’autorité parentale, statut qu’il a perdu.

Cette décision confirme que le retrait total de l’autorité parentale entraine, sans autre décision judiciaire spéciale, la suppression du droit de visite et d’hébergement, du parent concerné. Et s’inscrit dans une logique de renforcement de la protection de l’enfant face aux violences intrafamiliales et aux auteurs de telles violences.

 

[1] (CEDH, 7 août 1996, n° 17383/90, Johansen c/ Norvège ).

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